14/03/2009

AUBE, la Saga de l'Europe, III-20


– Ecoute, Permi, tu es fille de haut roi. Tu comprendras. Nous, nous devons aller combattre. J’en sais qui ne le font pas toujours de bon gré, mais qui le font cependant et qui, pour se laver de la première honte qu’ils ont eue, abattent tant d’ennemis qu’ils deviennent enragés quand ils s’aperçoivent que leur glaive n’a plus rien à moissonner. Tu pars comme ces guerriers, mais imagine la joie que tu auras à porter de futurs rois ou hauts rois. La tribu où tu vas entrer est la plus glorieuse d’Aryana. Crois-tu que j’aurais voulu une moindre alliance pour ma fille ?
– Le seul époux qui m’aurait convenu est un époux que j’aurais choisi !
– Les dieux me coupent les oreilles, d’avoir entendu une telle sottise !
Il resta un bon moment, bouche bée, à regarder sa fille. Le spectre hideux de la folie aurait-il frappé sa descendance ? Il l’examina, cherchant avec attention sur son visage les stigmates de son égarement. Si ses yeux brillaient de l’éclat violent de la colère, souvent semblable à celui de la folie, tout, dans le reste de son attitude, démentait qu’elle ait pu en être frappée. Les pommettes brillantes, la mâchoire lancée en avant, les bras croisés sur sa poitrine qui était déjà celle d’une femme, elle semblait bien plus un guerrier au défi qu’une femme égarée.
« Comme elle me ressemble ! » Il l'admira. Il en avait vanté la beauté à son futur époux, mais avait été au-dessous de la vérité. Il n'avait su lui parler de la force colorant le moindre de ses gestes, transparaissant dans la moindre de ses attitudes... « Peut-être ai-je mieux fait, d’ailleurs. Il n’aurait pas accepté de bon cœur pour épouse une femme à ce point capable de le dominer. » Il sentait sa volonté, la puissance de son refus... C’était par sa faute. Il avait chaque jour présenté les Chasseurs de loups comme des brutes frustes et malpropres. Elle avait trop bien compris la leçon. Elle les détestait, et leur roi, qu’elle devait épouser, pour le premier, aussi fort qu'il le lui avait appris. Elle s’en trouvait trahie et avilie. Honte sur lui de l’avoir conduite sur les chemins mêlés du désespoir et de la révolte. Il était trop tard. Il s’était engagé. Il serait beau s’il retournait auprès de Belonsis pour lui expliquer que, tout bien pesé, elle refusait de l’épouser. Qui suivrait un roi des rois qui cède ainsi à une femme ? Il se raidit.

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