01/12/2011

AUBE, la saga de l'Europe, 245

LE RAID
 
 
 Le camp et les enclos élevés pour les hôtes avaient été construits en voyant très large, trop même aux yeux des anciens. Habitués à cent jours de pauvreté pour un d’opulence, ils multipliaient les avis de faire plus petit. S'ils n’étaient pleins à déborder, leur clan perdrait la face. On dauberait sur sa gloriole... Voilà ce qui arrive, quand on veut péter plus haut que son cul !
Il avait ignoré ces craintes, même s’il s’en était agacé à l’extrême. Il avait, tant elles se révélaient vaines, tout lieu de s’en réjouir. Oh, on récriminait encore… dans le sens opposé. Ces rares déçus, hôtes tardifs logeant à la belle étoile, le taxaient de mesquinerie et d’incapacité à penser grand. Bravo à ses messagers ! Ils avaient parlé comme il fallait du raid et de son butin. Jamais son renom n’avait autant grimpé.
Comme chaque fois qu’un village se distinguait, on s’y pressait pour en admirer les héros et leurs prises. L’immense camp paraissait, en cette avant-veille du jour de présentation solennelle du butin et du troc, d’une ridicule exiguïté. Quelle affluence, et tous n’étaient pas encore là ! Le village et ses alentours étaient eux aussi pleins de cette foule impatiente, jouant des coudes, se bousculant, piétinant les champs, parfois. Dieux jumeaux de la nature merci, ils étaient moissonnés, et pas encore ensemencés. Les paysans se plaignaient néanmoins de l’honneur que faisaient tous ces hôtes abusifs avides d’admirer les résultats du raid déjà légendaire... Il resterait dans les mémoires.
Certains affectaient un air blasé. Mais ils scrutaient, quand ils se croyaient hors de vue, toutes les merveilles exposées. Cette curiosité n’était pas feinte. Leur intérêt croissait à leur vue. Beaucoup posaient des questions d’un air de fausse innocence, dans l’espoir d’en savoir plus sur ces trésors ramenés de chez les Muets. Ils étaient des acheteurs potentiels. Leur désir ne s’éteindrait qu’assouvi. Les trocs s’annonçaient fructueux.