18/03/2009

AUBE, la Saga de l'Europe, III-24

Sa fête, tous le savaient, serait somptueuse. Celle de Belonsis ne pouvait être moindre. Il en allait du renom de sa tribu. Il voulut organiser une battue, lui aussi. Kleworegs lui représenta qu’elle serait inutile. Il vaudrait mieux que tous participent à la sienne. Il n’en voulut pas démordre. Après un long marchandage où Belonsis concéda qu’une partie des siens – les moins nobles et les moins vaillants, comme il allait s’en apercevoir – prenne part à la battue commune, il se résolut à le laisser mener sa propre chasse. On tira au sort quel secteur de la forêt serait parcouru par ceux qui refusaient de chasser en commun. Sous leur prétexte invoqué, de ne demander à personne la moindre aide pour l’accueil de sa fille dans son nouveau clan, Kleworegs avait compris le défi. Il y avait dans leur esprit non une grande tribu faite de multiples clans, mais la sienne, et celle du Printemps Sacré. Il ne s'en inquiétait pas. Une fois sa fille calmée (et cela finirait par arriver, tout susceptible qu’elle fût), elle expliquerait à son époux combien son attitude était nuisible au bien commun, et combien il risquerait d’en pâtir... Mais elle ne semblait pas répondre à son attente.
Il allait pourtant la voir tous les jours. Il lui envoyait son épouse, guère plus âgée qu’elle, à qui elle pourrait se confier comme à une amie. Elle n’avait rien à dire. Elle écoutait ses exhortations, le nez de plus en plus baissé, l’air buté ou hargneux selon le moment. Il ne décolérait pas. Il aurait accepté un caprice, pas cette attitude déterminée et sournoise indigne d’une fille de roi. Ce fut bien pire quand elle refusa de s’alimenter. Elle tenait donc à gâcher sa beauté, à lui faire honte. Rien ne semblait venir à bout de son obstination. Il avait dompté des chevaux bien plus rétifs, mais ne savait comment agir avec elle. Sa conscience de ses droits de demospotis lui criait de la contraindre sans se soucier de ses réticences et de ses pleurs. Son sentiment de père lui soufflait de la persuader, de l’amadouer, de lui faire admettre que ce mariage projeté était le plus grand bonheur qui puisse lui arriver. La seule chose à laquelle il ne pouvait renoncer était cette union. Elle devrait le comprendre. Une fille de haut roi n’est pas une servante, qui peut s’accoupler à qui elle veut dans la mesure où cela ne crée aucun désordre.

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